Halte à la déconstruction de la filière industrie locale BTP !

Nos 53 industries locales participant à la filière du BTP, emploient environ 600 salariés directs, et réalisent un chiffre d'affaires de 200 millions d'euros sur 800 millions réalisés par la filière (2015). Elles fournissent des matériaux de construction issus de nos sols (briques, caillasses, roches, gravillons et sable), et autres matériaux (produits béton, charpente en bois, ?...). Elles travaillent les métaux (armatures et tôles, treillis soudés, constructions et menuiseries métalliques, gouttières, recyclage des métaux...). Elles sont également présentes dans les secteurs de l'assainissement, d'enrobés routiers, de peintures et vernis, de menuiseries aluminium et pvc, d'aménagement de cuisines et salles de bains, et de recyclage des palettes et déchets du bâtiment etc.

Elles nous ont sollicités sur leur situation dégradée. Nous les avons interrogées et réunies. Quel que soit le secteur d'activité, entre 2008 et 2016, elles connaissent une baisse de chiffre d'affaires autour de 40% voire plus et une baisse corrélée d'effectifs dans des proportions similaires et plus importantes suivant les cas. Certaines se maintiennent autant que faire se peut en recourant au chômage partiel ou technique. Toutefois, d'autres se préparent à des plans sociaux en raison de l'absence de visibilité pour 2018- 2019.
La situation que nos entreprises traversent est corrélée avec l'atonie actuelle de la filière BTP. Plusieurs organismes, et autres syndicats de professionnels, ont alerté les décideurs publics à longueur de tribunes et de rencontres en donnant des éléments étayés de diagnostic de la situation (casse des moteurs du BTP par l'arrêt de la défiscalisation, instruments de substitution non efficients, assèchement des finances des collectivités et apports financiers de celles-ci insuffisants, frilosité des organismes financiers, etc.). D'autres ont fait des propositions restées lettre morte.

Alors pourquoi une tribune de plus ?

A l'heure des politiques publiques prônant le financement de l'innovation, de l'éco-construction, le développement de filières dites « endogènes » , créatrices de valeur ajoutée locale ; en tant que porte-parole de la production locale, nous voulons attirer l'attention sur un certain nombre de faits vécus par nos adhérents et sur nos propositions à notre tour.
De formation ingénieur pour beaucoup d'entre nous, nos secteurs d'activités nous obligent à être intrinsèquement des « constructifs » , des « planificateurs » sur le moyen et long terme. Nous l'avons déjà écrit à propos de l'usine du Galion. Notre unité de temps est de 10 ans a minima.

Comment rester impassible lorsque l'on apprend que certaines opérations financées par des fonds publics écartent d'emblée (au stade de la rédaction du cahier des charges, ou en cours de réalisation), nos produits de l'industrie locale, fabriqués par des Martiniquais ? (prédalles béton, menuiseries...). Que d'autres opérations sont réalisées avec des centrales à béton in situ, mettant en péril l'équilibre financier des transporteurs et nos centrales de béton prêt à l'emploi.

Comment accepter des délais de paiement aussi longs favorisant ainsi de facto les structures très solides, adossées à de grands groupes nationaux, pouvant se permettre une avance de trésorerie, assortie d'importants intérêts moratoires ?

Comment rester inerte lorsque l'on apprend que les opérations de confortement parasismique de bâtiments publics et privés et des réseaux d'assainissement (réservoirs, réseau de canalisation...), celles de désamiantage de nombreux bâtiments seraient à l'arrêt par manque de financement, et devrions nous dire d'ingénierie financière viable.

Hervé Toussay, Président de l'AMPI