Le nouveau CCAG des marchés privés de travaux de bâtiment en enquête publique

La norme NF P 03-001 de décembre 2000 vit ses dernières semaines… Elle sera bientôt remplacée par une nouvelle version. Ce document type est très utilisé en pratique dans les marchés privés.
 
Mise à part une retouche minime apportée en novembre 2009, la norme NF P 03-001 aura traversé seize années sans subir de lifting. Une longévité exceptionnelle dans l’environnement mouvant qu’est celui du droit de la construction et des contrats. Bien connue des praticiens, cette norme constitue le cahier des clauses administratives générales (CCAG) applicables aux marchés privés de travaux de bâtiment qui s’y réfèrent.
 
Il était temps d’adapter ce document de référence aux évolutions de la réglementation, de la jurisprudence et des pratiques, comme cela a été fait l’an dernier pour sa cousine, la norme NF P 03-002 (CCAG des marchés privés de travaux de génie civil). « La révision de la norme NF P 03-001 a pris en compte notamment la réglementation sur la lutte contre le travail dissimulé et la fraude au détachement, les entreprises groupées, les délais de paiement, les intérêts moratoires, la médiation et l’assurance décennale », précise l’Afnor. Après plusieurs mois de travail, la commission de normalisation réunissant des représentants de la maîtrise d’ouvrage, de la maîtrise d’œuvre, des entreprises de construction et des pouvoirs publics a ainsi remis sa copie. Le projet de nouvelle norme NF P 03-001 est soumis à enquête publique du 12 septembre au 31 octobre 2016. L’objectif étant de faire paraître la norme en version homologuée début 2017.
 
Numérotation inchangée
Sur la forme, pas de surprise. Le projet de nouvelle norme conserve le même plan, la même numérotation principale. L’article premier rappelle que ce CCAG ne s’applique « que s’il est cité parmi les pièces contractuelles énumérées dans le marché ». Et que si les parties souhaitent l’appliquer mais en l’adaptant à leur sauce, « les modifications doivent être stipulées dans les pièces particulières du marché et être récapitulées dans le dernier article donnant la liste des dérogations au CCAG ».
 
Mise à jour des évolutions réglementaires
Sur le fond, pas mal de nouveautés. Certaines sont la transcription directe de nouveautés législatives ou réglementaires. Ainsi un nouvel article 4.6 rappelle l’obligation, pour les marchés privés de bâtiment d’un montant inférieur à 100 000 euros H.T. exécutés en cotraitance, de faire figurer à peine de nullité certaines mentions dans les pièces particulières du marché, et notamment celle de l’existence ou non d’une solidarité juridique des entreprises groupées envers le maître d’ouvrage. Cette obligation (voir aussi l’article 12.1 du projet de norme) résulte de la loi de transition énergétique du 17 août 2015. 
Par ailleurs, l’imprévision, inscrite dans le Code civil depuis la réforme du droit des contrats, est reprise à l’article 9.1.2 de la norme. Cette notion permet aux parties d’adapter leur contrat en cas de changement imprévisible de circonstances pour lutter contre les déséquilibres contractuels majeurs survenant en cours d’exécution. 
Issu aussi de la réforme du droit des contrats, le mécanisme de la réception avec réfaction (le maître d’ouvrage décide d’accepter de petites imperfections de l’ouvrage en proposant à l’entrepreneur une réfaction sur le prix) fait son apparition à l’article 17.2.6 du projet.
 
Autre apport notable, la norme nouvelle version comporte un article 5.4 consacré à la lutte contre le travail illégal et la fraude au détachement. Il y est rappelé l’obligation de vigilance pesant sur les cocontractants, et la nécessité de faire porter aux salariés et intérimaires intervenant sur le chantier la carte d’identification professionnelle – des sanctions étant prévues en cas de manquements. L’entreprise ayant recours à des travailleurs détachés doit aussi produire au maître d’ouvrage les pièces justifiant qu’elle est en règle à cet égard.
 
Enfin, les rédacteurs ont enrichi la norme de dispositions relatives à l’assurance de responsabilité décennale obligatoire (art. 23.3), à l’assurance dommages ouvrage (art. 23.4) et à la tous risques chantier (art. 23.5).
 
Dispositions de paiement améliorées
En matière de paiement, les entreprises ont obtenu des avancées dans le projet de norme. Le principe du versement d’une avance (« sauf disposition contraire ») y est à présent inscrit (art. 20.2). A l’inverse, le prélèvement d’une retenue de garantie sur les acomptes devient facultatif, en s’appliquant « si le marché le prévoit » (art. 20.5). 
La norme est mise à jour de l’encadrement juridique des délais de paiement : elle rappelle le taux des intérêts moratoires applicable et l’obligation de verser une indemnité de 40 euros pour frais de recouvrement en cas de retard de paiement (art. 20.6.2).
 
Ajouts divers
Parmi les autres nouveautés, les articles relatifs à la coordination en matière de sécurité et de protection de la santé (SPS) sont étoffés (art. 5.3). Notamment, les dispositions du Code du travail applicables sont désormais indiquées, ce qui rend la norme plus pratique à utiliser.
Un article est ajouté concernant les travaux à proximité des réseaux (art. 8.3), imposant à l’entreprise de suspendre l’exécution des travaux en cas notamment de découverte de réseaux non signalés engendrant un risque pour les personnes. L’entreprise « ne subira pas de préjudice du fait de cet arrêt des travaux et les actions complémentaires à celles prévues dans le marché initial feront l’objet d’un avenant à la charge du maître d’ouvrage », prescrit la norme.
A noter aussi, ère numérique oblige : les documents particuliers du marché peuvent prévoir, énonce le projet de norme, que les échanges entre les parties, y compris la facturation, peuvent se faire par voie électronique (art. 6.2.3).
Enfin, le projet de norme fait la part belle au règlement amiable des litiges, énonçant que les parties peuvent prévoir le recours à la médiation ou à la conciliation – et doivent le faire lorsqu’un professionnel contracte avec un particulier (art. 21.2).
 
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Source : Le Moniteur