Projet de loi Travail : la nouvelle version de la Commission des affaires sociales

Depuis le 7 avril, la Commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale a achevé l'examen du projet de loi travail (dit El Khomri) en l'adoptant avec 305 amendements sur 1010 déposés. Voici notre décryptage des principales modifications apportées au texte.

Vers une refondation du Code du travail
Les 61 principes Badinter ne sont plus mentionnés dans le projet de loi. Ils serviront de guide de référence pour la Commission de refondation du Code du travail (article 1er). D'ailleurs, dans le cadre de cette réécriture, la possibilité de déroger au repos quotidien de 11 heures, en cas d'accord ou de surcroît exceptionnel d'activité est supprimée (article 3).

Renforcement de la négociation collective reporté
Le projet de loi prévoit la mise en place d'une publication des accords collectifs. Celle-ci est reportée au 1er septembre 2017. En effet, la base de données existante au sein de la Direction Générale du Travail dans laquelle sont intégrés les accords déposés « nécessite des adaptations ».
Les nouvelles modalités de conclusion des accords collectifs (accord majoritaire, possibilité d'un référendum…), ne s'appliqueront qu'aux accords conclus à partir du 1er janvier 2017 et non plus à partir de la date d'entrée en vigueur de la loi (articles 10 et 11). Sont concernés, rappelons-le, les accords relatifs à la durée du travail, les congés, les repos et les accords de préservation ou de développement de l'emploi.
Concernant les autres thèmes relatifs à la négociation collective, la généralisation est reportée au 1er septembre 2019, au plus tard alors qu'elle devait initialement entrer en vigueur dans le délai d'un an à compter de la remise du rapport de la Commission de refondation.
Par ailleurs, pour le dépassement de la durée maximale hebdomadaire de travail ou d'accomplissement d'heures supplémentaires au-delà du contingent annuel, l'obligation d'information des institutions représentatives du personnel est rétablie (article 2).

Licenciement économique, droit à la déconnexion, tolérance URSSAF…nouveautés pour les TPE-PME
C'est un changement de taille qu'a opéré la Commission des affaires sociales sur les règles relatives au licenciement économique. Le texte, qui reprend un amendement proposé, instaurerait un régime spécifique pour les TPE-PME. En effet, concernant les motifs, la baisse du chiffre d'affaires ou du carnet de commandes serait appréciée en fonction de la taille de l'entreprise (article 30).
D'autre part, un amendement ramène de 300 à 50 le seuil à partir duquel une charte définissant les contours du droit à la déconnexion des salariés devrait être élaborée. Au-delà, ce droit serait à l'ordre du jour des négociations annuelles (article 25). Cette disposition entrerait en vigueur le 1er janvier 2017 (au lieu du 1er janvier 2018).
Par ailleurs, la sécurisation de la tolérance URSSAF existante pour l'exonération de cotisations sociales pour les cadeaux offerts aux salariés qui s'applique en l'absence de comité d'entreprise, est actée dans le projet de loi. La limitation passerait de 5% actuellement à 10% du PMSS par salarié et par an, dans le projet de loi (article 28).

Réforme de l'inaptitude et obligation de reclassement
Plusieurs amendements viennent préciser les dispositions réformant le régime de l'inaptitude (article 44). Dans le cadre de l'obligation de reclassement, l'employeur ne devra pas proposer qu'un seul poste mais plusieurs.

Elargissement du CPA aux retraités et nouvelles mesures pour les jeunes…
Certains amendements font évoluer le texte en élargissant le CPA aux retraités (article 21), ou encore la prolongation de deux ans des contrats en emplois d'avenir (article 43).
Pour répondre aux demandes des organisations de jeunesse, de nouvelles mesures en faveur des jeunes, ont été annoncées par Manuel Valls, le 11 avril dernier, telles que la prolongation des bourses ou encore la surtaxation des CDD.
A partir du 3 mai 2016, le projet de loi Travail sera examiné en séance publique de l'Assemblée nationale.
Nous continuerons à vous tenir informés des évolutions du texte dans nos publications.
La prochaine se penchera sur les travaux de la Commission de refondation du Code du travail.

Cette lettre est réalisée par : Sonia Yangui, Catherine Kramar, Mathieu Faria, Véronique Baroggi, Catherine Baret