Présentation de la loi travail

Pour certains la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, dite loi Travail, propose de revenir des années en arrière en matière d’avancées sociales. Pour ses défenseurs, c’est plus de dialogue social, plus de souplesse et de visibilité pour les entreprises, plus de protections pour les actifs et en particulier ceux en situation de précarité. L’objectif affiché est de créer des emplois durables.
En voici les points principaux :

- Une aide à la recherche du premier emploi, consistant en une aide financière, versée pendant 4 mois, pour accompagner la recherche du premier emploi, entre en vigueur dès la rentrée 2016.
- La loi Travail introduit pour la première fois dans le Code du travail un « droit à la déconnexion » pour les salariés entreprises de plus de 50 salariés qui ont désormais le devoir de mettre en place des instruments de régulation de l’outil numérique qui respectent les temps de repos et de congés ainsi que l’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle et familiale.
- La loi Travail formalise l'ouverture, en 2017, d'un compte personnel d’activité dans lequel, tout au long de sa carrière, elle accumulera des droits et pourra décider de leur utilisation : formation, départ anticipé à la retraite... Il comprendra le compte personnel de formation, le compte pénibilité et un nouveau compte d'engagement citoyen. Il sera ouvert aux retraités et, pour les salariés peu qualifiés (sans diplôme ou titre de niveau V, ou sans certification reconnue par une convention collective nationale de branche), l'alimentation du CPF est portée à hauteur de 48h par an, dans la limite d'un plafond de 400 heures.
- Le mécanisme de contestation des avis d’inaptitude émis par le médecin du travail est revu.
- La loi Travail définit rigoureusement l’emploi saisonnier et modifie les règles de protection du travailleur saisonnier. Les 35 heures demeurent la référence légale. Un accord d’entreprise peut ramener la majoration de la rémunération des heures supplémentaires de 25 à 10 %.
- La durée maximale quotidienne de travail pourra, par accord d'entreprise, être portée de 10 à 12 heures, en cas d'activité accrue ou pour des motifs liés à l'organisation de l'entreprise. Il sera aussi possible, toujours par accord d'entreprise, de passer à une moyenne hebdomadaire de travail de 46 heures (au lieu de 44) sur 12 semaines. Le forfait jour est sécurisé pour l’entreprise qui aura conclu une convention de branche à ce sujet. Toutefois, une telle convention défaillante sur les garanties minimales en termes de santé et de sécurité ne sera plus forcément annulée si l’employeur se montre rigoureux sur ces points.
- La loi précise la définition du motif économique du licenciement, afin de rendre plus claires les règles applicables, en particulier dans les PME. Sont repris dans la définition du licenciement économique, les motifs issus de la jurisprudence de la Cour de cassation, à savoir : la cessation d’activité de l’entreprise et la réorganisation de l’entreprise en vue de la sauvegarde de sa compétitivité. Par ailleurs, les difficultés susceptibles de justifier un licenciement économique sont précisées en reprenant des éléments issus de la jurisprudence : une baisse des commandes ou du chiffre d’affaires, des pertes d’exploitation, une importante dégradation de la trésorerie ou tout élément de nature à justifier de ces difficultés. Le périmètre d’appréciation des difficultés reste international.
- Une commission d’experts et de praticiens des relations sociales, comprenant un nombre égal de femmes et d’hommes, est instituée afin de proposer au Gouvernement une refondation de la partie législative du Code du travail.
- Les accords d’entreprise primeront sur les accords de branche, dans les domaines de l'organisation et du temps de travail. Un accord d'entreprise, pour être valide, devra être majoritaire (signé par des syndicats représentant plus de 50% des suffrages aux dernières élections). Dans les entreprises dépourvues de délégués syndicaux, l'employeur pourra conclure un accord d'entreprise avec un élu ou un salarié mandaté (par un syndicat) dans tous les domaines où la négociation collective est ouverte.
- Faute d'avoir pu signer un accord majoritaire, les syndicats minoritaires (représentant quand même au moins 30% des suffrages aux dernières élections) pourront initier un référendum auprès des salariés pour valider l'accord. L'accord sera valide s'il est approuvé par les salariés à la majorité des suffrages exprimés.
- Les branches vont être amenées négocier un ordre public conventionnel, autrement dit des sujets pour lesquels elles n'autoriseront pas un accord d'entreprise à prévoir des mesures moins favorables que l'accord de branche. Les sujets revenant forcément à la branche sont le salaire minimum, les classifications, les garanties collectives en matière de prestations sociales complémentaires, la mutualisation des fonds pour la formation professionnelle, la pénibilité, et l'égalité homme-femme.  
- Il sera possible, par accord d'entreprise, de revoir l'organisation du travail, y compris en termes de durée et de rémunération, en vue de préserver ou développer l'emploi. Seul garde-fou : le maintien de la rémunération mensuelle des salariés. Cet accord primera sur le contrat de travail. L'employeur pourra licencier le salarié qui refuse la modification de son contrat. Celui-ci bénéficiera d'un licenciement spécifique (ni économique, ni personnel) et du nouveau parcours d'accompagnement personnalisé, mais sans les mesures de reclassement.  L'accord de préservation et de développement de l'emploi pourra prévoir une clause « de retour à meilleure fortune » prévoyant les conditions dans lesquelles les salariés bénéficient d'une amélioration de la situation économique de l'entreprise à l'issue de l'accord ».
- Certaines durées de congés exceptionnels sont modifiées. Un accord d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche peut fixer le début de la période de référence pour l’acquisition des congés et majorer la durée du congé en raison de l’âge, de l’ancienneté ou du handicap.
- Sauf opposition du salarié, l’entreprise pourra choisir de remettre la fiche de paie sous format électronique.
- L’interdiction de licencier les femmes de retour de congé maternité passe de 4 semaines à 10 semaines.
- Le crédit d’heures pour la formation des délégués syndicaux est augmenté de 20 %.
- Le règlement intérieur peut contenir des dispositions inscrivant le principe de neutralité et restreignant la manifestation des convictions des salariés si ces restrictions sont justifiées par l’exercice d’autres libertés et droits fondamentaux ou par les nécessités du bon fonctionnement de l’entreprise et si elles sont proportionnées au but recherché.

Certaines dispositions de la loi sont entrées en vigueur dès sa promulgation. Pour d'autres, il faudra attendre la rédaction de plus de cent décrets d'application qui nécessiteront sans doute d'autres consultations avec les partenaires sociaux. D'autres encore entreront en application à certaines dates spécifiques. Il en va ainsi des nouveaux critères pour légitimer un licenciement économique, qui seront applicables à compter du premier décembre 2016 les nouveaux contentieux. C'est le premier janvier 2017 que s'appliquera la règle de l'accord majoritaire à 50% pour valider un accord d'entreprise.

Source : Actu Juridiques
Gazette du Palais