La clause de non-concurrence sans contrepartie financière

Depuis 2011, la Cour de cassation considérait que l’absence de contrepartie financière à une clause de non-concurrence, entrainait systématiquement la nullité de cette clause. Ceci ouvrait droit à des dommages et intérêts pour le salarié pénalisé dans sa liberté de travailler. Dans une décision récente, la Cour de cassation est revenue sur l’aspect systématique du préjudice.

Clause de non-concurrence : conditions de validité

Pour être licite, la clause de non-concurrence doit répondre à 5 critères cumulatifs :

* être indispensable à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise ;
* être limitée dans le temps ;
* être limitée dans l’espace ;
* tenir compte des spécificités de l’emploi du salarié ;
* comporter une contrepartie financière.

Dans un arrêt de 2008, une cour d’appel avait débouté un salarié de sa demande de dommages et intérêts concernant sa clause de non-concurrence sans compensation  pécuniaire. Elle avait estimé que la clause n’avait causé aucun préjudice au salarié car la résiliation du contrat de travail et l’annulation de la clause lui avaient permis de retrouver sa liberté d’exercer un même emploi chez un autre employeur.

La Cour de cassation avait censuré cette décision en 2011, au motif que le salarié avait été nécessairement empêché, tout au long de sa relation de travail, de postuler dans des entreprises concurrentes. Ceci constituait donc une violation du principe fondamental de libre exercice d’une activité professionnelle ouvrant droit à des dommages et intérêts.

C’est sur ce point que la Cour de cassation est revenue.

Clause de non-concurrence : préjudice en l’absence de contrepartie financière

Un salarié dont la clause de non-concurrence était dépourvue de contrepartie financière s’était vu débouté par la cour d’appel de sa demande d’indemnisation au titre de ce préjudice. Fort des dispositions jurisprudentielles de 2011 et d’une situation assez semblable, il avait porté son affaire devant la Cour de cassation. 

Mais la Cour de cassation a rejeté cette demande aux motifs que l’existence d’un préjudice et l’évaluation de celui-ci relèvent du pouvoir souverain d’appréciation des juges du fond, en l’occurrence la cour d’appel. Celle-ci ayant estimé que le salarié n’avait subi aucun préjudice résultant de l’illicéité de la clause de non-concurrence, la demande n’était pas fondée. La Cour est ainsi revenue sur l’indemnisation systématique du préjudice de non compensation financière de la clause de non-concurrence. Selon ce dernier arrêt, le préjudice doit dorénavant être caractérisé. Le seul empêchement de postuler dans des entreprises concurrentes n’est plus suffisant et, selon les termes de l’arrêt, seuls les juges du fonds peuvent évaluer le préjudice d’après l’examen des faits.

Les salariés se voient donc privés de faire reconnaitre leur préjudice immatériel et de porter un recours auprès de la Cour de cassation pour contester la décision des juges d’appel.

Source : Tissot