Preuve de la volonté non équivoque de ne pas recevoir l’ouvrage

Deux époux, ayant confié la réalisation des travaux de gros-oeuvre de leur maison à un constructeur, aujourd'hui en liquidation judiciaire, constatent des désordres après leur installation et obtiennent en référé la désignation d'un expert et la réalisation de travaux d'urgence par un autre constructeur puis, avec leur assureur habitation, assignent en réparation les deux constructeurs et leur assureur.

Les maîtres d’ouvrage et leur assureur font grief à l'arrêt de surseoir à statuer sur les demandes formées contre le constructeur en raison d'une absence de déclaration des créances litigieuses à la procédure collective de ce dernier, alors que les juges sont tenus de faire respecter et de respecter eux-mêmes le principe de la contradiction et qu'en relevant d'office en l'espèce le moyen tiré de l'absence de déclaration de la créance, sans inviter au préalable les parties à présenter leurs observations sur ce moyen qu'elle relevait d'office, la cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile et l'article 6 de la Conv. EDH.

Or, en application de l'article 380-1 du Code de procédure civile, la décision de sursis à statuer rendue en dernier ressort ne peut être attaquée par la voie du pourvoi en cassation que pour violation de la règle de droit gouvernant le sursis à statuer et, une telle violation n'étant pas invoquée, le moyen est irrecevable.

Ne donne pas de base légale à sa décision au regard de l'article 1792-6, alinéa 1er, du Code civil la cour d’appel qui, pour rejeter les demandes des époux et de leur assureur, retient qu’ils ont indiqué que leur installation dans les lieux ne pouvait plus être différée compte tenu de leurs impératifs financiers, qu'ils retenaient le solde du marché en attente de l'exécution de ses engagements par le constructeur, qu'ils avaient exprimé des réserves et fait état de risques de désordres structurels et que la preuve de la volonté, non équivoque, des maîtres d'ouvrage d'accepter l'ouvrage, même avec réserves, n'est pas rapportée, motifs qui ne suffisent pas à caractériser une volonté non équivoque de ne pas recevoir l'ouvrage, après avoir relevé que les maîtres d’ouvrage avaient  réglé la quasi-totalité du marché lors de leur prise possession des lieux. 

 

Cass. 3e civ., 13 juillet 2016, n° 15-17208